L’État, dans l’Empire ottoman et en Turquie, a longtemps été décrit comme un modèle d’État fort et unitaire, capable d’imposer de façon unilatérale son ordre et ses règlements à la société. Considéré comme une instance souveraine largement imperméable aux demandes sociales, il a alors été analysé comme l’initiateur et l’acteur principal – sinon unique – des processus de « modernisation » et d’« occidentalisation » que la société a traversé depuis le xixe siècle.
Les paradigmes d’analyse du politique dans l’Empire ottoman et en Turquie
De la dichotomie État/société à la dialectique socio-étatique
Les rapports État-partis comme clé de lecture du politique en Turquie républicaine
L’État, dans l’Empire ottoman et en Turquie, a longtemps été décrit comme un modèle d’État fort et unitaire, capable d’imposer de façon unilatérale son ordre et ses règlements à la société. Considéré comme une instance souveraine largement imperméable aux demandes sociales, il a alors été analysé comme l’initiateur et l’acteur principal – sinon unique – des processus de « modernisation » et d’« occidentalisation » que la société a traversé depuis le XIXe siècle. En s’inspirant de la démarche initiée par Barrington Moore dans son analyse des origines sociales de la dictature et de la démocratie1, Serif Mardin et Metin Heper proposent une lecture en négatif des configurations sociales ottomanes et turques. Selon Mardin, l’Empire ottoman n’a jamais traversé les processus constitutifs de la formation de l’État moderne occidental. Il n’aurait pas connu les multiples « confrontations [observables en Angleterre et en France] menées pour trouver des compromis avec ce qui peut être appelé les forces de la périphérie : la noblesse féodale, les cités, les bourgeois et plus tard, le travail industriel2 ». C’est d’ailleurs en s’appuyant sur ce constat qu’il avance son idée devenue dominante dans la sociologie et la science politique turque, de la prégnance du clivage centre/périphérie comme ligne de fracture principale des sociétés ottomane et turque.
Cette absence supposée de « tradition de multiples confrontations agissant comme modes de résolution des conflits3 » permet à Heper de conclure que « la République de Turquie a hérité de l’Empire ottoman un État fort et une société civile faible4 » et que « l’ouverture du système dans cette configuration n’a pas créé de situation de face-à-face entre groupes socio- économiques ou entre une autorité centrale et des notables intransigeants, mais entre un État dominant et une périphérie non organisée5 ». Cette idée d’un « face-à-face » entre État et élites sociales pose évidemment problème car l’intérêt et l’autorité du premier sont considérés comme antithétique à ceux des secondes, sans que ceci ne soit jamais empiriquement démontré. Elle a pourtant longtemps été mobilisée par de nombreux auteurs, à l’instar d’Ali Kazancıgil et Ergun Özbudun, qui, lorsqu’ils analysent le passage de l’Empire à la République, affirment que « les Jeunes-Turcs et les kémalistes [...] étaient les héritiers de la vieille tradition patrimoniale, qui supposait la domination de l’État sur la société et réservait le monopole de légitimation et d’autorité aux élites étatiques, aux dépens des élites sociales et économiques6 ». Il est indéniable qu’observée depuis le « centre », la formation de l’État ottoman semble correspondre à l’affirmation du pouvoir sultanien sur les forces sociales susceptibles de lui contester son autorité.
Cependant, cette vision dichotomique des relations entretenues entre officiels de l’État et forces économiques et sociales a orienté les travaux historiographiques vers la recherche des ressorts historiques, politiques, économiques et sociaux de cette domination de l’État sur sa société et des signes en attestant (discours et textes normatifs notamment), ce qui peut expliquer pourquoi l’image fantasmée d’un despotisme oriental ottoman a longtemps persisté dans la littérature.
Un autre ensemble de travaux partage cette idée d’un État autonome et dominant, mais s’en détache en considérant que l’importation de l’État « moderne » en Anatolie aurait été obtenue par le volontarisme d’une élite occidentalisée regroupée dans le parti-État kémaliste7 et par l’adoption de codes et de règlements empruntés aux États européens. Tout se passe alors comme si la marche turque vers « la modernité » 8 avait suivi une voie linéaire, sous l’égide d’un supposé modèle ouest-européen: les réformes ottomanes du XIXe siècle (Tanzimat) représenteraient l’aboutissement d’un effort de rationalisation par importation de techniques de gouvernement élaborées ailleurs; la première Constitution ottomane, promulguée en 1876, résulterait de l’influence, forcément décalée dans le temps, de l’esprit des lumières européen9 et de l’importation d’une pensée contractualiste10 ; la transformation du réduit anatolien en État-nation républicain, la refonte systématique des instruments de l’action publique (recensement, codes juridiques) et l’adoption de nouvelles pratiques culturelles (latinisation de l’alphabet, port du chapeau, consommation d’alcool, abandon de la tradition « césaropapiste », modernisation des techniques 11 , etc.) découleraient du volontarisme d’élites occidentalisées et de contacts contingents avec certaines populations européennes12. Feroz Ahmad affirme ainsi que « les kémalistes voulaient voir la Turquie transformée en État nation moderne qui, selon les mots de Mustafa Kemal (Atatürk), “vivrait comme une nation avancée et civilisée au beau milieu de la civilisation contemporaine”. Une telle nation devait être laïque et rationnelle, encourageant la science et l’éducation moderne pour créer une économie industrielle moderne13 ». Attentifs aux modalités de l’importation d’un modèle étatique occidental, les auteurs tendent à considérer les spécificités repérables dans les pratiques concrètes de gouvernement comme les révélateurs d’un écart à la norme importée, en postulant la supériorité de ladite norme occidentale et en évaluant la situation turque à l’aune de celle-ci.
Un autre ensemble de travaux partage cette idée d’un État autonome et dominant, mais s’en détache en considérant que l’importation de l’État « moderne » en Anatolie aurait été obtenue par le volontarisme d’une élite occidentalisée regroupée dans le parti-État kémaliste7 et par l’adoption de codes et de règlements empruntés aux États européens. Tout se passe alors comme si la marche turque vers « la modernité » 8 avait suivi une voie linéaire, sous l’égide d’un supposé modèle ouest-européen: les réformes ottomanes du XIXe siècle (Tanzimat) représenteraient l’aboutissement d’un effort de rationalisation par importation de techniques de gouvernement élaborées ailleurs
La première Constitution ottomane, promulguée en 1876, résulterait de l’influence, forcément décalée dans le temps, de l’esprit des lumières européen9 et de l’importation d’une pensée contractualiste10 ; la transformation du réduit anatolien en État-nation républicain, la refonte systématique des instruments de l’action publique (recensement, codes juridiques) et l’adoption de nouvelles pratiques culturelles (latinisation de l’alphabet, port du chapeau, consommation d’alcool, abandon de la tradition « césaropapiste », modernisation des techniques 11 , etc.)
Ces dernières années, de nombreux historiens ont néanmoins tourné le dos à ce type d’analyses. Ainsi que le note Marc Aymes, « il n’est pas certain que, vue de la province, l’histoire de l’Empire ottoman [...] soit l’apanage d’un centre (étatique) dictant sa loi [...]. La gouvernementalité ottomane ne se limite pas à la trame des compromis administratifs, mais engage aussi d’autres registres de relations sociales, d’autres expériences et d’autres attentes14 ». C’est ce que soulignent Albert Hourani15 et Philip Khoury16 dans leur paradigme dit de la « politique des notables » en analysant le rôle clé des élites sociales dans le fonctionnement quotidien du régime ottoman : ils attestent du rôle d’intermédiaires qu’ont pu jouer les notabilités locales entre le gouvernement et sa population. Les travaux de Suraiya Faroqhi ont quant à eux permis d’attester que, dès les XVIe et XVIIe siècles, les sujets du Sultan ne subissaient pas passivement les décisions de la Porte et mettaient en œuvre des « initiatives politiques » (résistances, contournements, accords) leur permettant d’élargir leurs marges de manœuvre17. Sur ce point, Reşat Kasaba, dans la lignée des travaux de Joel Migdal et des « State-in-societies studies »18, a montré dans une étude consacrée aux changements sociaux dans l’Empire ottoman au XIXe siècle, que les réformes des Tanzimat représentaient des formes d’accommodement des institutions étatiques à l’égard, notamment, de groupes sociaux non musulmans19. De ces travaux attentifs aux médiations par lesquelles les acteurs étatiques et extra-étatiques se concurrencent et s’entendent20, il ressort que les protagonistes des arènes officielles ne constituent bien souvent que des prétendants parmi d’autres aux jeux socio- politiques, exposés aux effets inattendus de leur ambition hégémonique21, et non les acteurs dominants que certains travaux stato-centrés ont pu décrire.
Ainsi, plutôt que de dissocier les élites sociales et les personnels de l’État, Michael Meeker évoque un « système étatique non officiel22 ». Il décrit comment une « oligarchie sociale régionale d’origine impériale » a pu s’épanouir au contact ou au sein des institutions publiques. Les recherches de Meeker montrent ainsi que les élites locales anatoliennes ont pénétré le système étatique à mesure que l’État ottoman étendait son contrôle sur ses provinces. Elles suggèrent en outre que c’est par leur enracinement dans les sociétés locales que les protagonistes des arènes officielles ont pu se voir reconnaître l’autorité qu’ils prétendaient exercer. Quand des mesures de renforcement du gouvernement central furent adoptées au XIXe siècle, ces élites locales furent capables de s’adapter pour diversifier leurs positions dans le système étatique provincial et central. Si l’on suit les conclusions proposées par Meeker, il y a lieu de considérer que, loin de l’idée d’une dichotomie entre l’État et les « élites » sociales, économiques ou religieuses, ce sont ces « oligarchies sociales régionales » qui ont « négocié et surveillé l’incorporation des terroirs dans le giron de l’État23 », tout en mettant en place des tactiques de pénétration du système étatique provincial et central. Ainsi, les notables trouvent dans l’administration impériale des possibilités de s’allier, ou de s’opposer aux représentants de l’État, afin de pérenniser leurs positions de domination sociale et économique. Jane Hathaway observe le même type de processus à l’œuvre au Caire en analysant comment des personnalités locales ambitieuses cherchaient à obtenir les faveurs du centre impérial en rejoignant des maisonnées (households) de fonctionnaires impériaux, qui, de leur côté, tentaient de pénétrer les maisonnées de grands personnages locaux en y plaçant leurs clients24. Ces initiatives croisées aboutirent à la constitution d’un système étatique ottoman provincial assimilable, selon l’auteur, à un « hybride administratif ».
Il convient ainsi de se déprendre d’un modèle de jeu à somme nulle : les interactions entre secteurs étatiques et groupes sociaux peuvent très bien aboutir au renforcement (ou à l’affaiblissement) de chacune des deux parties. Les travaux d’Ariel Salzmann, consacrés à l’institution, à partir de 1695, de concessions fiscales à bail emphytéotique (malikâne), soulignent l’importance de ces accords d’affermage dans l’évolution du système ottoman d’administration provinciale25. Cette délégation de la gestion des territoires et de l’affermage de l’impôt a eu pour effet de consolider les positions d’élites sociales et économiques disposant des ressources nécessaires pour accéder à ces baux, tout en assurant au Trésor le versement régulier d’avances importantes. Sans expansion formelle de la bureaucratie stambouliote elle-même, le nouveau contrat liait une force de travail à l’État en même temps qu’il permettait à ce dernier d’étendre sa force de patronage fiscal. C’est donc en termes d’interdépendances, d’accords et de collusions, mais également de concurrences, de résistances et de contournements que l’interpénétration des institutions étatiques et de leur environnement doit être pensée.
Dans certains secteurs d’action publique, tel le maintien de l’ordre, le régime recours d’ailleurs régulièrement à des pratiques de délégation. Pendant la seconde moitié du XIXe siècle, c’est en s’appuyant sur le concours d’hommes de main, de bandes organisées et de milices capables de faire respecter l’ordre, que la police s’est imposée dans l’espace urbain29.
Ce constat reste valide après le passage à la République : le contrôle qu’exercent les institutions publiques sur la distribution des ressources continue à encourager les initiatives visant à influencer l’intervention publique pour en bénéficier. Pendant la période de parti-État kémaliste, le pouvoir s’appuie également sur les élites locales pour exercer le pouvoir à distance. C’est dans cette perspective que Murat Metinsoy analyse les nombreux rapports établis par les députés, visant à informer les administrations centrales des mécontentements et des revendications des populations rencontrées dans leur circonscription. Il montre que ces rapports constituaient un moyen, pour l’État et le parti unique, de pallier la fragilité de leur hégémonie, en s’enquérant de l’opinion et des revendications des populations. En l’absence de participation directe des citoyens, ils constituaient autant de dispositifs de médiation, qui encouragent l’auteur à considérer l’État républicain comme un régime autoritaire flexible fortement imbriqué dans la société26. Par ailleurs, les réformes les plus emblématiques de la période du parti unique n’ont pu revêtir quelque légitimité qu’en associant les représentants des secteurs visés par la puissance publique. C’est le cas de la politique de laïcisation. Nathalie Clayer a montré que, loin d’être imposée aux intéressés de manière autoritaire, elle fut liée aux multiples initiatives des acteurs du champ religieux, institutionnels ou non. Les nouvelles institutions religieuses mises en place par le régime représentent alors, davantage que de simples instruments de pouvoir, des lieux de négociation et de coproduction de l’action publique entre les acteurs du champ religieux et la puissance publique27. Les savoirs nécessaires à l’élaboration et à la mise en œuvre des réformes ont d’ailleurs obligé le régime à s’adjoindre les services de savants et d’hommes de science. Les travaux d’Emmanuel Szurek consacrés à la « révolution de la langue » (dil devrimi) et à l’instance qui en fut la cheville ouvrière, l’Institut turc du langage (Türk Dil Kurumu) en donnent de très riches exemples28. En reconstituant la multiplicité des agents intervenant dans la politique linguistique menée par le régime kémaliste, Szurek donne à voir les multiples interactions entre savants, hommes politiques et parti unique dans l’élaboration de l’action publique en Turquie kémaliste. Ces travaux récents mettent en lumière l’entrelacement des institutions publiques et des sociétés locales pendant la période du parti unique. Ils permettent de relativiser l’idée de l’imposition systématique d’un ordre nouveau par le parti-État kémaliste.
Ces phénomènes ne se limitent nullement à l’espace urbain. Ils sont par également observables dans le Sud-Est de l’Anatolie à la fin du XIXe siècle, quand le sultan Abdülhamid II forme des régiments tribaux, les Hamidiye, faisant de certaines tribus kurdes des alliées de l’État à qui ce dernier délègue certaines de ses prérogatives30. Dans les années 1980, alors que la guerre contre le PKK s’intensifie, les pouvoirs publics auront encore recours à des soutiens civils, en mettant en place des milices villageoises – les protecteurs de village (Köy Korucusu) – dans les régions kurdes afin de soutenir la stratégie de contre-insurrection menée par l’État turc. La diachronie donne alors à voir des périodes de relative centralisation de la violence – la période du parti unique (1923-1946) en est une – et d’autres de renonciation au monopole de la violence physique face à la contestation de groupes sociaux disposant des moyens de tenir tête aux forces de l’ordre – telle la seconde moitié des années 1970, quand des groupes radicaux armés parviennent à soustraire certaines parties du territoire à l’autorité de l’État31.
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L’une des caractéristiques les plus remarquables, et peut être les plus décisives, de ces transactions réside dans la place centrale qu’y occupent les partis politiques, de façon discontinue depuis la proclamation de la République. Les partis de gouvernement déploient leur personnel politique et leurs militants au sein des institutions étatiques afin de s’approprier des ressources publiques qu’ils distribuent à leurs partenaires et à leurs soutiens33. Ces activités de captation des ressources publiques représentent des modes d’accumulation primordiaux pour les partis. Elles contribuent également à la faiblesse de l’autonomie des institutions publiques qui disposent de capacités très différentes à poser les règles de leur propre fonctionnement et à contrôler leur recrutement34. Elles sont exposées aux stratégies de pénétration mises en œuvre par les partis de gouvernement qui, en intervenant dans leurs procédures de recrutement, contribuent à leur politisation. L’influence des partis dans le fonctionnement quotidien de la fonction publique en fait alors les intermédiaires privilégiés des forces sociales désireuses d’accéder aux ressources publiques.
En intervenant dans les procédures de nomination des fonctionnaires et des employés des entreprises publiques, les partis de gouvernement disposent d’un puissant moyen de rétribution de leurs militants et d’entretien de leurs clientèles électorales, ce qui leur permet de trouver le concours humain indispensable à leurs activités politiques et de contrôler les institutions visées. La présence de soutiens dans les institutions constitue également un atout en période électorale, les militants fonctionnarisés disposant alors des moyens de l’État pour soutenir le travail de mobilisation électorale du parti. De plus, une fois au gouvernement, les partis peuvent modifier le droit ou s’en accommoder, ce qui leur permet de se renforcer et de marginaliser d’autres acteurs (partis politiques, fonctionnaires, entreprises).
Les positions occupées par les partis dans l’État leur confèrent alors un rôle d’arbitrage dans l’allocation des ressources et des marchés publics. L’omniprésence du secteur public, au moins pendant la période où l’économie est dirigée (1923-1980), fait de l’État un lieu privilégié d’investissement pour les partis politiques, tant il représente la voie principale d’accumulation du capital. La centralisation historique des ressources économiques et sociales dans le giron étatique explique d’ailleurs cette tendance à l’implantation des partis dans l’État, qui contribue à faire de ces derniers de véritables intermédiaires pour les acteurs du monde économique et social35. Jusqu’en 1980, la Turquie a mis en œuvre des politiques économiques protectionnistes appuyées sur l’intervention massive de l’État. Cette stratégie de développement a façonné les modes d'accumulation du capital et a contribué à l'émergence et à la croissance de grands groupes économiques entretenant des relations étroites avec les gouvernements. Ayşe Güneş-Ayata note en outre que « dans une société où ressources sont rares et où l'État est un élément fondamental dans l'allocation des ressources, le clientélisme est utilisé comme une stratégie de participation par certaines classes et groupes sociaux, pour mettre en place, dans leur propre intérêt, un système d'allocation fermé36 ». Ces pratiques de captation des ressources et des positions publiques permettent donc aux partis de négocier des soutiens politiques et de privilégier leurs partenaires sectoriels, économiques mais aussi syndicaux. Dans la période contemporaine, il apparaît par exemple clairement que l’AKP favorise la confédération syndicale Hak-İş qui lui est affiliée, non seulement en modifiant la législation syndicale à son avantage37 – ce qui lui permet à la confédération d’intervenir dans les accords de branche, de signer des conventions collectives et ce faisant, de se renforcer face à ses concurrents sectoriels – mais aussi en encourageant l’embauche de membres de la confédération dans les entreprises bénéficiant de l’attribution des marchés publics. Avec l’adoption du néolibéralisme au début des années 1980, les formes et les mécanismes de l'intervention gouvernementale dans l'économie sont profondément modifiés. Les transformations de l’économie politique du pays affectent les modalités du contrôle partisan des ressources publiques. La libéralisation économique contraint les partis à passer d’un contrôle direct des ressources publiques à la délégation et au contrat. Par ailleurs, la montée en puissance des pouvoirs municipaux et l’augmentation des ressources disponibles dans les arènes locales ont modifié les modalités de la captation des ressources publiques, ouvrant des jeux de concurrence plus complexes que par le passé. Les mesures incitatives qui avaient permis la constitution et le développement d’une bourgeoisie nationale fortement liée à l’État, telles les protections tarifaires, l'allocation de contrats d’exportation et des quotas d'importation, et les différents mécanismes de subvention à la production ne sont alors plus disponibles. Mais, si l’adoption des principes néolibéraux a changé les formes des transactions collusives observables, les privatisations et les délégations de services publics bénéficient prioritairement aux partenaires sectoriels des partis au pouvoir. Et ce sont les partis, par leurs positions dans l’État, qui ont orchestré l’élaboration et la mise en œuvre des réformes qui ont accompagné le passage à une économie politique néolibérale. Ces pratiques ont donc des conséquences sur l’organisation et l’autonomie des champs sociaux, dans la mesure où l’État consiste en un réseau d’institutions organisant les frontières entre champs et la transformation des capitaux de différentes natures. Ainsi que le note Pierre Bourdieu, « les changements à l’intérieur du champ sont souvent liées à des changements dans les rapports avec l’extérieur du champ », et « entre tous les échanges avec l’extérieur du champ, les plus importants sont ceux qui s’établissent avec l’État38 ». Il apparaît ainsi que l’investissement de l’État par les partis entraîne une perte d’autonomie des champs sociaux, dont les rythmes, les enjeux et les rapports de forces internes entrent en connexion : les positions qu’ils occupent dans les institutions publiques contribue alors à l’alignement tendanciel des champs politiques, économiques, mais aussi syndicaux et médiatiques. Les relations collusives entretenues entre les membres des institutions publiques et le parti au pouvoir permettent à ce dernier de monopoliser les ressources publiques et de les redistribuer à ses partenaires sectoriels (syndicats, organisations patronales, etc.), ce qui renforce les positions de chacun des membres de la coalition dans leurs secteurs respectifs.
Les pratiques de captation des ressources et des positions publiques mises en œuvre par les partis sont en outre porteuses de plusieurs effets sur le système politique. Tout d’abord, l’État apparaissant comme l’enjeu des luttes politiques, les institutions ne peuvent pas être neutralisées. Les partis ne se contentent pas d’intervenir dans les procédures de nomination des membres de la fonction publique, ils attendent des fonctionnaires qu’ils se comportent de façon à soutenir le gouvernement dans leur pratique professionnelle quotidienne. Par le contrôle des nominations et des promotions dans la fonction publique39, les partis au pouvoir s’assurent ainsi un mode de rétribution efficace de leurs soutiens, ainsi que le concours d’une administration acquise à leur cause. Ce faisant, ils substituent aux lois et règlements en vigueur des modes de certification et des filières d’accès partisanes à la fonction publique40. L’investissement de l’État par les partis produit donc une politisation et une désobjectivation des institutions. Ces processus sont observables à la fois dans les pratiques des fonctionnaires et dans les représentations qu’en a le public. Dans leurs pratiques professionnelles, les fonctionnaires tendent à privilégier les forces politiques qui leur ont permis d’accéder à leur poste ; pour les administrés, l’État apparaît alors comme un espace de concurrence davantage que comme un réseau consolidé d’institutions. L’ensemble étatique subit donc ce qu’on peut analyser comme une perte d’objectivation, mais sans que celle-ci ne participe à une entrée en conjoncture critique du système : les rapports sociaux qu’il abrite et dans lesquels sont pris ses participants ne se caractérisent aucunement par leur extériorité ou leur impersonnalité, par ailleurs, leur perception ne s’opère nullement sur le mode de « ce qui va de soi» (taken for granted)41. Sous ces deux aspects, les institutions apparaissent largement désobjectivées. Ces processus conduisent le public à s’adapter à ce qu’il suppose être les biais politiques de l’administration, par l’adoption de signes distinctifs d’appartenance à un mouvement politique ou religieux (la façon de porter la moustache est par exemple un marqueur politique fort, tout comme le port du voile en est un pour les femmes dans l’accueil du public)42.
Les pratiques de captation conduisent par ailleurs à la consolidation des partis dominants et entretiennent l’instabilité politique en période de gouvernements de coalition. En contexte monopolistique – quand un parti accède seul au gouvernement – le parti dominant dispose des ressources et des positions étatiques pour se renforcer électoralement. L’investissement massif de l’État par le parti au pouvoir lui permet de réduire fortement les possibilités d’alternance en utilisant les ressources spécifiques du gouvernement et en bâtissant des coalition sociales. Il peut en outre se servir des positions qu’il occupe dans l’État pour synchroniser les rapports inter-champs et constituer de larges coalitions sociales susceptibles de l’aider à se maintenir au pouvoir. Pendant les périodes de coalitions gouvernementales, les ressources accumulées dans les institutions publiques permettent aux partis de tenir tête à leurs partenaires gouvernementaux. Cependant, l’impossibilité que rencontrent chacun des partis de la coalition gouvernementale à mettre en œuvre un investissement massif de l’État empêche la monopolisation des positions publiques, ce qui nourrit l’instabilité gouvernementale. La trajectoire politique de la Turquie donne ainsi à voir une alternance de périodes où des partis dominants forment seuls des gouvernements, puis se maintiennent au pouvoir par des réélections successives (1950-1960 ; 1965-1971 ; 1983- 1991 ; 2002- ) et de périodes de gouvernements de coalition caractérisés par une forte instabilité (1961-1965 ; 1974-1980 ; 1991-2002). Ces deux configurations contraignent différemment la forme des captations des ressources publiques: les configurations monopolistiques permettent la monopolisation tendancielle des positions publiques, tandis que les configurations concurrentielles – qui correspondent aux périodes de gouvernements de coalition – voient l’accès aux institutions publiques faire l’objet de transactions inter- partisanes pour la répartition des ressources et des positions étatiques. Selon la configuration observable, les modalités d’investissement de l’État sont donc différentes, mais les institutions publiques tendent à chaque fois à devenir « partisanes ». Dans les situations concurrentielles, l’accès aux institutions publiques est partagé et fait l’objet de transactions partisanes pour la répartition des ressources publiques. Les institutions tendent alors à se diviser à deux niveaux. D’abord, la répartition des portefeuilles ministériels entre les partenaires des coalitions au pouvoir affecte directement la cohésion de l’action gouvernementale. Les partis tentent alors de s’approprier des ministères pour y faire nommer leurs personnels et orienter la définition et la mise en œuvre des politiques publiques sectorielles. Ensuite, les institutions peuvent être investie par plusieurs acteurs politiques simultanément et devenir des arènes de concurrence politiques.
L’appropriation de l’État par les partis a enfin encouragé l’entrée de l’armée dans le champ politique. L’armée est parfois considérée comme une institution « extérieure » qui stabiliserait le système politique incapable de se réguler. Les militaires convoquent d’ailleurs, lors de chacune de leurs interventions (1960, 1971, 1980 et 1997), le rôle de protectrice de l’intégrité de l’État que les trois constitutions successives (1924, 1961 et 1982) confient à l’armée. L’hypothèse d’une armée extérieure au système fait cependant l’impasse sur le fait que le fonctionnement même de l’armée peut être vu comme une conséquence de l’absence de neutralité de l’État. Contrairement aux analyses faisant des coups d’États militaires des modes de régulation du système par une armée « gardienne » des institutions, les interventions de l’armée dans le jeu politique peuvent être analysées comme un répertoire créé par le jeu politique. L’armée subit, comme les autres institutions étatiques, l’influence des logiques partisanes. Elle connaît également des processus de politisation de certains de ses secteurs, exposés, et parfois opposés, aux initiatives politiques du gouvernement et du parti dominant. L’institution militaire apparaît alors en tension interne permanente entre des secteurs intégrés aux réseaux collusifs des partis de gouvernement, et d’autres, pour qui le coup d’État représente un moyen de prendre – ou de garder – le contrôle de l’institution tout en revendiquant son autonomie politique. Elle est donc, à l’image des autres institutions publiques, exposée aux initiatives partisanes visant à l’investir l’État et à l’influencer, mais a disposé des ressources coercitives nécessaires pour se protéger des initiatives des partis et reconfigurer le jeu politique à son avantage43.
L’histoire de l’Empire ottoman et de la République de Turquie donne ainsi à voir des configurations fluctuantes d’interpénétrations et de chevauchements entre des secteurs étatiques, politiques et économiques, bureaucratiques et partisans, légaux et illégaux. Et loin de l’image d’un État fort et fortement différencié de la société, se dévoilent des intérêts partagés et des positionnements multiples, qui font de l’État un ensemble de positions à conquérir fonctionnant comme autant de possibilités d’accumulation de ressources reconvertibles dans d’autres arènes.
Benjamin Gourisse, maître de conférences (Paris-Dauphine, IRISSO)
1 — Barrington Moore, Social Origins of Dictatorship and Democracy: Lord and Peasant in the Making of the Modern World, Beacon Press, Boston, 1966.
2 — Şerif Mardin, « Center-Periphery Relations: A Key To Turkish Politics? », Daedalus, n° 102, 1973, p. 170.
3 — Metin Heper, The State Tradition in Turkey, Northgate, The Eothen Press, 1985, p. 149. 4 Ibid., p. 16.
4 — Ibid., p. 16.
6 — Ali Kazancıgil, Ergun Özbudun, Atatürk: Founder of a Modern State, Londres, C. Hurst and Company, 1981, p. 48.
7 — Paul Dumont, Mustafa Kemal invente la Turquie moderne, Bruxelles, Complexe, 1983 [nouvelle édition 1997 et 2006].
9 — Şerif, Mardin, « L’influence de la Révolution française sur l’Empire ottoman », Revue internationale des sciences sociales, 119 (1989).
10 — Şerif Mardin, The Genesis of Young Ottoman Thought: A Study in the Modernization of Turkish Political Ideas, Syracuse, Syracuse University Press, 2000.
11 — Donald Quataert, Manufacturing and Technology Transfer in the Ottoman Empire 1800-1914, Istanbul, Isis Press, 1995.
12 — Arnold Reisman, Turkey’s Modernization: Refugees from Nazism and Ataturk’s Vision, Washington D.C., New Academia Publishing, 2006.
13 — Feroz Ahmad, The making of Modern Turkey, Londres, Routledge, 1993, p. 53.
14 — Marc Aymes, « Provincialiser l'empire », Annales. Histoire, Sciences Sociales n°6/2007 (62è année), p. 1328.
15 — Albert Hourani, « Ottoman reforms and the politics of notables », in William R. Polk et Richard L. Chambers (dir.), Beginnings of modernization in the Middle East: The nineteenth century, Chicago/Londres, The University of Chicago Press, 1968, pp. 41-68.
16 — Philip S. Khoury, « The urban notables paradigm revisited », Revue des mondes musulmans et de la Méditerranée, vol. 55, n° 55-56, 1990, pp. 215-228.
17 — Suraiya Faroqhi, « Political Initiatives ‘From the Bottom Up’ in the Sixteenth- and Seventeenth-Century Ottoman Empire : Some Evidence for Their Existence », in Hans Georg Majer (dir.), Osmanistiche Studien zur Wirtschafts- und Sozialgeschichte : In Memoriam Vanco Boskov, Wiesbaden, Otto Harrasowitz, 1986, pp. 24- 33 ; Suraiya Faroqhi, « Political Tensions in the Anatolian Countryside around 1600 : An Attempt at Interpretation », in Jean-Louis Bacqué-Gramont et al. (dir.), Türkische Miszellen : Robert Anhegger Festschrift, Istanbul, Divit, 1987, pp. 116-130 ; Suraiya Faroqhi, « Political Activity among Ottoman Taxpayers and the Problem of Sultanic Legitimation (1570-1650) », Journal of the Economic and Social History of the Orient, n° 35, 1992, pp. 1-39; Antonis Anastasopoulos (dir.), Political Initiatives “from the bottom up” in the Ottoman Empire [Actes des Halcyon Days in Crete VII, 9-11 janvier 2009], Réthymnon, Crete University Press, 2012.
18 — Joel S. Migdal, Strong Societies and Weak States, Princeton, Princeton University Press, 1988.
19 — Reşat Kasaba, « A Time and a Place for the Nonstate: Social Change in the Ottoman Empire during the Long Nineteenth Century », in Joel S. Migdal et al., State, Power and Social Forces : Domination and Transformation in the Third World, Cambridge, Cambridge University Press, 1994, p. 207-230.
20 — Sur le cas turc, voir notamment Yael Navaro-Yashin, Faces of the State : Secularism and Public Life in Turkey, Princeton, Princeton University Press, 2002.
21 — Timothy Mitchell, « The Limits of the State », American Political Science Review, vol. 85, n° 1, 1991, pp. 77- 96 ; Veena Das, Deborah Poole, « State and its Margins: Comparative Ethnographies », in Veena Das, Deborah Poole (dir.) Anthropology in the Margins of the State, Santa Fe, New Mexico, School of American Research Press, 2004, pp. 6-34.
22 — Michael E. Meeker, A Nation of Empire. The Ottoman Legacy of Turkish Modernity, Berkeley / Los Angeles, University of California Press, 2002, p. xxi.
23 — Jean-François Bayart, L’État en Afrique. La politique du ventre, Paris, Fayard, coll. L’espace du politique, 2006, p. 272.
24 — Jane Hathaway, The politics of households in Ottoman Egypt. The Rise of the Qazdaḡlıs, Cambridge, Cambridge University Press, 1997, p. 24.
25 — Ariel Salzmann, Tocqueville in the Ottoman Empire. Rival Paths to the Modern State, Leiden & Boston, Brill, 2004, pp. 87-88.
26 — Murat Metinsoy, « Fragile Hegemony, Flexible Authoritarianism, and Governing from Below: Politicians' Reports in Early Republican Turkey », International Journal of Middle East Studies, vol. 43, n° 4, 2011, p. 699- 719. Voir également Yiğit Akın, « Reconsidering state, party and society in early republican Turkey : politics of petitioning », International Journal of Middle East Studies, vol. 39, n° 3, 2007, p. 435-457 ; Catherine Alexander, Personal States. Making connections between people and bureaucracy in Turkey, Oxford/New York, Oxford University Press, 2002.
27 — Nathalie Clayer, « Un laiklik imposé ou négocié ? L’administration de l’enseignement de l’islam dans la Turquie du parti unique », in Marc Aymes, Benjamin Gourisse, Élise Massicard (dir.), L’art de l’État en Turquie. Arrangements de l’action publique de la fin de l’Empire ottoman à nos jours, Paris, Karthala, coll. Meydan, 2014, pp. 103-126.
28 — Emmanuel Szurek, Gouverner par les mots. Une histoire linguistique de la Turquie nationaliste, Thèse de doctorat (non publiée), Ecole des Hautes Etudes en Sciences Sociales, 2013.
29 — Noémi Levy-Aksu, Ordre et désordres dans l’Istanbul ottomane (1879-1909), Paris, Karthala, coll. Meydan, 2012.
30 — Gilles Dorronsoro, « Les politiques ottomane et républicaine au Kurdistan à partir de la comparaison des milices Hamidiye et korucu : modèles institutionnels, retribalisation et dynamique des conflits », European Journal of Turkish Studies, 5 (2006) : Power, ideology, knowledge - deconstructing Kurdish Studies, URL : http://ejts.revues.org/778, §1 ; Janet Klein, The Margins of empire. Kurdish militias in the Ottoman tribal zone, Stanford, Stanford University Press, 2011.
31 — Hamit Bozarslan, « Le phénomène milicien : une composante de la violence politique en Turquie des années 70 », Turcica, n°31, 1999, pp. 185-244.
32 — Cette partie reprend et synthétise les éléments développés dans Gilles Dorronsoro, Benjamin Gourisse, « Une clés de lecture du politique en Turquie : les rapports État-partis », Politix, 107, 2015.
33 — Pour une étude des activités de pénétration de l’État par les partis pendant les années 1970, voir Benjamin Gourisse, « Party Penetration of the State: the Nationalist Action Party in the late 1970s », in Élise Massicard, Nicole Watts, (dir.), Negotiating Political Power in Turkey: Breaking up the Party, Londres, Routledge, 2012, pp. 118-139.
34 — Pour une étude de cette question appliquée à la police turque dans les années 1970 et à ses conséquences sur les sociabilités internes à l’institution et les pratiques des fonctionnaires, voir : Benjamin Gourisse, « Pluralité des rapports aux normes professionnelles et politisation des pratiques dans la police turque des années 1970 », European Journal of Turkish Studies [Online], 8 | 2008, URL : http://ejts.revues.org/index2273.html (consulté le 8 juin 2013).
35 — Voir notamment Zafer Toprak, Türkiye'de Ekonomi ve Toplum (1908-1950). Milli Iktisat - Milli Burjuvazi (Economie et société en Turquie (1908-1950). Economie nationale, bourgeoisie nationale), Istanbul, Tarih Vakfi Yurt Yayınları, 1995 ; Şevket Pamuk, « Political Economy of Industrialization in Turkey », MERIP Reports, 93, January, 1981.
36 — Ayşe Güneş-Ayata, « Class and Clientelism in the Republican People’s Party » in Andrew Finkel Nükhet Sirman (dir.), Turkish State, Turkish Society, London, Routledge, 1990, pp. 181. Sur les transactions clientélaires unissant partis politiques et acteurs locaux, voir également Ergun Özbudun, «Turkey: the Politics of Clientelism » in Samuel Eisenstadt, René Lemarchand (dir.), Political Clientelism, Patronage and Development, Beverly Hills, Sage, 1981 ; Horst Unbehaun, Klientelismus und Politische Partizipation in der Ländlichen Türkei. Der Kreis Datça 1923-1992 (Clientélisme et participation politique dans la Turquie rurale. Le canton de Datça, 1923-1992), Hambourg, Schriften des Deutschen Orient-Instituts, 1994.
37 — Işıl Erdinç, «AKP Döneminde Sendikal Alanın Yeniden Yapılanması: Hak-İş ve “Ötekiler”»[La reconstruction du champ syndical sous le gouvernement de l'AKP: Hak-İş et "les autres"], Çalışma ve Toplum, Mars, 2014.
38 — Pierre Bourdieu, Les structures sociales de l’économie, Seuil, Paris, 2000, pp. 249 et 250.
39 — Tous les postes de l’administration ne sont pas appropriés par les partis de gouvernement. Les procédures de contrôle et de différenciation de certaines administrations (comme l’armée ou la diplomatie), notamment du point de vue de leur recrutement, contrastent ainsi avec la grande ouverture d’autres institutions de fait moins autonomes (comme la police ou l’éducation nationale par exemple).
40 — Benjamin Gourisse, « Participation électorale, pénétration de l’État et violence armée dans la crise politique turque de la seconde moitié des années 1970. Contribution à l’analyse des crises politiques longues », Politix, Vol. 2, n° 98, 2012.
41 — Michel Dobry, Sociologie des crises politiques, Presses de la FNSP, 1986, p. 154.
42 — Benoît Fliche, « Eléments pour une trichologie turque », dans Marie-France Auzépy, Joël Cornette (dir.), Histoire du poil, Paris, Belin, 2011.
43 — Cette capacité de l’armée à assurer son autonomie par le coup d’État a cependant connu de sérieuses limites depuis l’arrivée de l’AKP au pouvoir en 2002. En reprenant à son compte le projet européen du pays, le parti a pu obtenir une marginalisation progressive de l’armée. La vague de réformes liées à la candidature européenne du pays, ainsi que les exigences des bailleurs de fonds internationaux et du Fonds Monétaire International ont fortement contribué à la réduction des positions des militaires dans le système politique. Elles ont encouragé le patronat à prendre ses distances avec l’armée pour soutenir les initiatives réformistes de l’AKP.
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Bibliothèque du Congrès, « Geography of Turkey » [archive], Bibliothèque du Congrès.
http://www.revues-plurielles.org/_uploads/pdf/9_16_17.pdf
François Surbezy, Les Affaires d'Arménie et l'intervention des puissances européennes (de 1894 à 1897), Université de Montpellier.
(tr) Institut des statistiques turques, recensement de 2014.
Statistique Eurostat au 1er janvier 2015. Consulté le 1er janvier 2015.